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jeudi 26 juin 2025

Qu'est ce que l'intelligence économique et quelle est la politique d'IE en France ?

L’intelligence économique regroupe toutes les activités coordonnées visant à collecter, traiter et diffuser des informations utiles aux acteurs économiques, afin qu’ils puissent les exploiter efficacement. À cela s’ajoutent des actions d’influence, de gestion de la notoriété et de protection de l’information. Elle se distingue totalement de l’espionnage économique ou industriel, car elle s’exerce de manière ouverte, en s’appuyant exclusivement sur des informations blanches ou grises obtenues légalement. D’autres formes d’« intelligence », telles que l’intelligence sociale, peuvent venir compléter ce dispositif, notamment en organisant la mutualisation de l’information pour améliorer la performance collective des acteurs économiques.

Cet article vise à permettre au lecteur de mieux appréhender cette discipline et de comprendre comment elle s’inscrit dans une vision politique globale, que ce soit à l’échelle stratégique de l’entreprise ou à l’échelle régalienne de l’État.


I - Définition et principes fondamentaux


Le terme « intelligence économique » est la traduction de l’anglais « competitive intelligence », mais il revêt une double signification en français : à la fois « inter ligere » (faire le lien entre plusieurs éléments) et « renseignement » au sens anglo-saxon.

Les experts du domaine résument l’intelligence économique en trois piliers : 

  • la veille et la compréhension de l’information (acquérir des informations stratégiques pertinentes)
  • la protection de l’information (éviter que des données sensibles ne soient divulguées)
  • l’influence (diffuser des informations ou des normes de comportement qui servent sa propre stratégie afin de minimiser la contrainte subie et de maximiser la maîtrise des conséquences).


II - Évolution historique et conceptualisation


Le concept d’intelligence économique a été conçu dans son acception française seulement à la fin des années 1980. Depuis longtemps les Américains avaient développé des pratiques adaptées à leurs réalités concurrentielles, que ce soit dans le monde civil ou militaire.

En France, l’information est souvent perçue comme l’équivalent du pouvoir, donc elle ne se partage pas, et peine énormément à circuler au sein des entreprises, et a fortiori au sein des administrations françaises. Elle a été longtemps marquée comme un moyen de pouvoir personnel. Elle constitue un obstacle récurrent à la démarche collective de management de l’information, surtout dans un contexte où l’information stratégique peut et doit servir de nombreux département au sein des entreprises.

Du point de vue historique, la France a longtemps été en retard en comparaison avec les États-Unis ou la Grande-Bretagne sur la valorisation de l’information dans un processus décisionnaire. Durant l’entre-deux-guerres, les milieux décisionnaires politiques et militaires français ont montré beaucoup de réticence à intégrer le renseignement stratégique à leur prise de décision.

De l’autre côté de l’Atlantique, le concept de « Business Intelligence » a été conçu pour aider les dirigeants à mieux penser l’utilisation de l’informatique comme moyens, outils et méthodes de collecte, de modélisation de l’information structurée. Dès le début des années 1960, les firmes se sont mises à recruter des anciens des agences de renseignement qui ont eu pour mission de mieux cerner les capacités offensives de la concurrence afin de trouver les bonnes ripostes. Cette démarche est à l’origine du concept de « Competitive Intelligence. »

Dès le début des années 1970, Stevan Dedijer formalise l’importance clé des trois facteurs qui sont la source de la puissance des nations : l’information, la connaissance et la technologie.  Il décrit la dynamique de l’intelligence à travers le processus de transformation d’une donnée, en information, en connaissance pour devenir au final « intelligence ».

L’absence de vision globale a lourdement pénalisé la prise en compte par les élites dirigeantes non américaines de ces nouveaux terrains de réflexion, que sont le domaine académique (management stratégique, marketing, gestion), le domaine entrepreneurial (pilotage de projets, surveillance de la concurrence, protection des données, lobbying) et le domaine institutionnel (diplomatie économique, influence, sécurité économique, sécurité de l’information).

La France a néanmoins fini par tirer son épingle du jeu en enrichissant le concept d’IE en adoptant une approche historique et multiculturelle, en décalage avec le côté monobloc et monoculturel de la vision anglo-saxonne. Un parallèle intéressant peut d’ailleurs être fait entre l’approche coloniale des Britanniques et celle des Français.

Henri Martre a été en 1994 l'auteur d'un premier rapport sur l'intelligence économique intitulé Intelligence économique et stratégie des entreprises

Henri Martre a été, en 1994, l’auteur d’un premier rapport sur l’intelligence économique intitulé « Intelligence économique et stratégie des entreprises ». En 1997, les fondateurs de l’École de guerre économique, Christian Harbulot et le général Jean Pichot-Duclos ont fait évoluer l’intelligence économique en une matrice de réflexion et d’action structurée autour de trois principes : la recherche de puissance, l’analyse des affrontements économiques et la transversalité de l’information.

Le développement international et la compétition avec les nouveaux pays capitalistes illustrent le caractère conflictuel de ce domaine. Se concentrer uniquement sur les problématiques liées au produit est une approche trop limitée et risquée pour une compréhension globale. Il est donc conseillé de constituer une bibliothèque de questions thématiques afin de garantir l’exhaustivité de l’analyse.

La dimension juridique et stratégique ainsi que la cyberstratégie sont des composantes essentielles. La cyberstratégie ne doit pas être perçue seulement comme un aspect technique relevant de la direction de la sécurité des systèmes d’information, mais elle implique aussi l’expert en intelligence économique, qui intervient sur la dimension informationnelle de la cyberstratégie de l’entreprise. D’origine militaire, la cyberstratégie s’est développée autour des systèmes d’information pour le commandement des forces (SICF), avec pour objectif de protéger ses propres systèmes, d’acquérir des informations de l’adversaire, de les dégrader et de manipuler l’information accessible à l’adversaire pour altérer sa prise de décision.


III - Modèles étrangers et enseignements historiques

[1] - La stratégie allemande au XIXe et XXe siècle

Au cours du XIXe siècle, les conquêtes commerciales ont commencé à supplanter les conquêtes territoriales. Contrairement à une guerre classique de terrain, les conquêtes commerciales visent à accroitre la puissance d’un État par l’élargissement de sa sphère d’influence sur des marchés extérieurs. 

Par-delà les conflits guerriers, la guerre économique est une réalité bien comprise des dirigeants politiques français, et notamment chez Clemenceau qui, dès 1915, estimait que le danger allemand était plus redoutable dans la paix que dans la guerre, en raison de la manière dont l’Allemagne avait su développer une économie compétitive au point de rivaliser sur le plan mondial avec celle de l’Empire britannique.

Plusieurs légitimations traversent l’histoire de l’intelligence économique : la légitimation de la guerre économique, la financiarisation internationale de l’économie, la légitimation agricole, ou encore la vision historique allemande de la guerre économique, telle que décrite par Siegfried Herzog dans son « Plan de guerre économique de l’Allemagne ». Herbert Hoover, alors ministre américain du Ravitaillement, note dans la préface de l’ouvrage de Herzog que la France, à cette époque, n’a guère pris en compte les intentions allemandes ni la vision historique de la guerre économique.

Parmi les éléments clés de la puissance économique figurent l’adaptabilité du commerce d’exportation, l’attitude des pays étrangers, l’émigration de l’industrie nationale, les compensations économiques, la protection de l’État, les unions industrielles de protection, les traités de commerce, les moyens de dénationaliser les produits manufacturés, l’habileté dans la concurrence et le capital. 

Ainsi, l’Allemagne, aujourd’hui première puissance économique d’Europe, doit beaucoup à son système national d’intelligence compétitive, fondé sur un fort patriotisme économique. Ce modèle s’appuie sur une organisation au niveau des Länder, impliquant tous les acteurs locaux produisant de l’information pour les entreprises, consultables à tous les échelons (fédéral, Länder, chambres consulaires, banques). Autour de ce réseau officiel gravitent d’autres réseaux parallèles de collecte et de diffusion de l’information stratégique : banques à l’étranger, cercles de travail, universités, instituts de technologie, compagnies d’assurances. Tous ces capteurs œuvrent de concert au profit des entreprises et des objectifs stratégiques définis localement.

Parce que le décryptage du présent se nourrit toujours d’une méditation approfondie de l’histoire, et donc des œuvres intellectuelles du passé, le retour sur quelques grands textes fondateurs se révèle systématiquement utile. 

Notes introductives de Herbert Hoover (alors ministre américain du Ravitaillement) sur l'ouvrage de S. Herzog : La France n'eut quant à elle que peu d'égard sur les intentions allemandes à cette époque ni sur la vision historique de la guerre économique.

Deux ouvrages majeurs doivent prioritairement faire ici l'objet d'un rappel historique, afin de mieux appréhender la stratégie de guerre économique élaborée par l'Allemagne au début de XXe siècle :

Ces deux ouvrages ont fait l'objet d'une fiche de lecture extrêmement détaillée, incluant de nombreuses citations, et consultable en ligne en suivant le lien approprié.

Dans son livre historique publié initialement en 1915, et traduit en français seulement en 1919, S. Herzog dans son livre « Le plan de guerre commerciale de l’Allemagne » réalise une analyse digne du plus grand intérêt. Certains ouvrages semblent — malgré eux — s’évertuer à démontrer l’improbable loi selon laquelle un succès d’édition est inversement proportionnel à son importance historique. Ce livre est fondateur à plus d’un titre. Pour la première fois, les règles d’une certaine forme de guerre économique opposant les principales puissances européennes dès la fin du XIXe siècle furent clairement édictées (sous la forme d’une stratégie globale qu’il serait naïf et dangereux d’ignorer). « Tout commerce est une guerre », écrit l’auteur, ce qui l’amène logiquement à concevoir, pour paraphraser Clausewitz, que le commerce est la continuation de la guerre par d’autres moyens. Dit autrement, c’est la notion de paix qui s’en trouve singulièrement circonscrite et relativisée. Les nations et les alliances sont en état de guerre permanent, et même les neutres doivent être, à leur insu, utilisés pour conquérir de nouveaux marchés.

Herzog explique que la condition nécessaire à la bonne marche de l’industrie est qu’elle ne soit pas troublée par des conflits entre employeurs et employés. En effet, tout doit concourir à favoriser les industries « protectrices » et réduire au maximum les risques de variations des prix des matières premières. L'auteur avait déjà compris il y a cent ans que tout mécanisme financier nécessaire à la stabilisation des prix des matières premières devait être entrepris, pour protéger l’industrie allemande et contribuer à son efficacité et sa compétitivité. Dans la mesure du possible, il faut, selon l’auteur, se décorréler des fournisseurs étrangers et remplacer si possible ces matières premières par d’autres de provenance nationale.

Il s’agit de mettre en place pour l’Allemagne une véritable armée de l’exportation de produits allemands, avec des procédures strictes, un ordre de bataille et une tactique !

Herzog explique déjà en 1915 qu’il est possible de transplanter une industrie vers un autre pays à bas cout; que dans un premier temps des avantages importants se font sentir pour la maison mère, mais que passé ce délai, les pays où elle est implantée peuvent étrangler la maison mère en devenant indépendants, voire même en devenant de sérieux concurrents !

Dans un contexte évident de défiance de l’Allemagne, le sujet de la dénationalisation des produits allemands afin d’en cacher leur provenance, est abordé par l’auteur. Des manières de transbordage sont évoqué pour cacher aux acheteurs hostiles à l’Allemagne, les produits manufacturés par l’ancien ennemi des Alliés. On peut ici reconnaître que ce procédé est largement récupéré par les États-Unis lors d’achat de pétrole, notamment au Venezuela, où des cargaisons sont transbordées « ship-to-ship » dans les eaux internationales, pour en effacer le pays d’origine...

L’accroissement et la sécurité du commerce d’exportation après la conclusion de la paix, est selon Herzog, dépendant des facteurs suivants : 

  • Adaptabilité du commerce d’exportation
  • Attitude des pays étrangers
  • Emigration de l’industrie nationale
  • Compensations économiques
  • Protection de l’État
  • Unions industrielles de protection
  • Traités de commerce
  • Moyens de dénationaliser les produits manufacturés
  • Habilieté dans la concurrence
  • Capital

On ne peut qu’être surpris par la transparence et la clairvoyance de cette analyse de 1915.

Enfin, l’auteur préconise également aux industries allemandes de travailler à une coopération obligatoire, dans le but de maintenir sur un pied d’égalité tous les genres d’exportation industrielles. Ce concept a été repris sous le nom de « Konzern », terme allemand désignant les grands groupes de l’industrie allemande qui ont financé le parti nazi et utilisé la main-d’œuvre des pays envahis par l’Allemagne nazie et des camps de concentrations. Les konzerns ont été lancés de manière massive par l’État impérial allemand qui était très protectionniste. C’est en 1904 par exemple qu’est fondé le cartel de la chimie qui regroupait AGFA, BAYER, et BASF. S. Herzog en expose le caractère « d’industrie indispensable » en décrivant la production de potasse, alors monopole prussien.

Maintenant, ce terme représente de puissantes associations d’entreprises (à l’instar des Keiretsu japonaises) qui reposent sur une intégration sectorielle verticale et horizontale, un esprit entrepreneurial familial et un appui bancaire (plus simple à obtenir lorsqu’il est formulé par plusieurs entités se portant garantes les unes pour les autres). Ils sont principalement localisées dans la région catholique des Länder de Bavière et de Bade-Wurtemberg ou des dynasties familiales font perdurer une gestion long-termiste de leur entreprise.

De manière conclusive sur l’ouvrage de Siegfried Herzog, on peut dire que l’État allemand demeure extrêmement protecteur envers ses industries essentielles dites de « protection » qui ne doivent pas être transplantées, et qu’il offre un support financier important par l’intermédiaire d’un fond général de garantie, tant pour subventionner des stocks supplémentaires de matières premières, que pour réduire le prix de vente à l’export de certains produits manufacturés allemands. Prônant également une coopération étroite entre entrepreneurs, industriels et la fonction publique, toutes les forces concernées doivent travailler dans le but unique d’accroître la puissance d’exportation de l’Empire allemand, avec le concours des cabinets diplomatiques. Enfin, une muraille de Chine du secret doit, selon l’auteur, être mis en place, tant sur les entrées dans le capital des entreprises sensibles, que sur la fidélité indéfectible que doivent avoir les employés de ces industries, « du patron aux porteurs d’eau ». Enfin, les sièges et les voix des Conseils d’administration doivent « être entièrement soustrait à l’action étrangère. »

On voit ici que l’Allemagne est un des pays européens précurseurs de l’IE. Contrairement aux Français qui n’ont pas saisi l’importance de cet ouvrage, les Américains le firent traduire immédiatement à sa sortie en 1915, et le diffusèrent très largement même avant la fin des hostilités de la Grande Guerre. Nul doute que nous payons aujourd’hui encore des erreurs d’appréciation datant bientôt d’un siècle…

Quant à l'ouvrage de Henri Hauser, historien français et économiste, il a dans son ouvrage parfaitement analysé les stratégies allemandes d'expansion économique au XIXe siècle, et a même parfaitement su réaliser des comparatifs détaillés avec la France et la Grande-Bretagne. Il analyse parfaitement la mécanique industrielle et la chaine de valeur nécessaire à la croissance économique industrielle :

  • Règle #1 : Pour faire des produits, il faut déjà des producteurs : seule une population abondante et croissante permet une production intense, et aussi cette accélération dans la consommation intérieure qui détermine l’accélération de la production et rend l’exportation nécessaire.
  • Règle #2 : L'esprit d'association et de coopération : le seul moyen d’y parvenir, c’est de développer l’esprit d’association entre les entreprises allemandes, et de favoriser l'entente pour servir les intérêts du pays.
  • Règle #3 : Amélioration des services de l'Etat : l’auteur souhaite la disparition de la bureaucratie paperassière qui étouffe toutes les initiatives, décourage les volontés les mieux trempées, énerve les énergies.

On ne peut qu'encourager le lecteur à relire cet ouvrage ou du moins la fiche de lecture associée, afin de mesurer le degré de modernité qui prévaut encore dans la définition des stratégies d'expansion économique et d'industrialisation.

[2] - Les guerres de l’opium de 1839 et 1856

Les guerres de l’opium de 1839 et 1856 motivés par des raisons commerciales opposèrent au XIXe siècle la Chine de la dynastie Qing, voulant interdire le commerce de l’opium sur son territoire, au Royaume-Uni qui voulait l’imposer en paiement des marchandises qu’elle importait.

Des stratégies de soumission orchestrées par l’Occident lors des deux guerres d’Opium ont ainsi successivement opposé la Chine à la Grande-Bretagne, puis la Chine à une coalition de pays occidentaux, et où l’on voit un monde occidental imposant à un pays indépendant le commerce de la drogue par des moyens militaires ! Se saisissant de prétextes quelconques, la Grande-Bretagne et la France de Napoléon III ont en effet envoyé vers Pékin un corps expéditionnaire avec mission de contraindre l’empereur à ouvrir son pays à leurs commerçants et missionnaires. C’est ce que l’on a appelé plus tard la « Seconde guerre de l’opium » ou les Français et les Anglais brûlent le Palais d’été de l’empereur de Chine, près de Pékin, après l’avoir pillé.

[3] - De l'URSS à la Russie : un continuum de la symbolique du titane

De nouvelles adversités économiques voient le jour, et la nécessité d’une veille d’IE est primordiale pour contrer toute situation générant une faiblesse économique, voire un impact politique. On peut citer la Russie dans sa course aux matières premières. Sa stratégie consiste dans le contrôle par le pays d’une grande partie des cours mondiaux des matières premières et dans une forme indirecte de contrôle de la productivité des entreprises occidentales et des pays émergents.

On peut citer par exemple le contrôle quasi exclusif des ressources en titane qui impacte directement toute l’industrie aéronautique civile, et en conséquence aussi bien Airbus, Safran, que Boeing. Ceci est un exemple de pouvoir de contrainte fort quoique discret sur lequel la Russie a bâti sa nouvelle puissance internationale. Sur le marché du titane de qualité aéronautique, la dépendance occidentale à la Russie reste très forte (jusqu’à 50 % pour certains avionneurs). Malgré les sanctions occidentales, le titane russe n’a pas été directement visé, en raison de la dépendance de l’aéronautique mondiale. Des efforts de diversification (Arabie saoudite, Japon, Inde, Chine) sont en cours, mais la Russie reste en 2025 un acteur clé, même si sa part pourrait légèrement diminuer à moyen terme avec l’entrée de nouveaux producteurs.

Depuis la chute de l’URSS, la Russie a occupé une place de leader mondial dans la production de titane, en particulier pour le titane de qualité aéronautique (25-30 % du marché, jusqu’à 50 % pour l’aéronautique). 

La production d'éponges de titane est le maillon de base de l'industrie du titane

Sa part dans la production totale d’éponge de titane (forme poreuse du titane non allié qui est la matière première utilisée dans la métallurgie des poudres pour produire des composants métalliques en titane) est de 13 % en 2025, en recul relatif face à la montée de la Chine, mais sa domination sur le segment stratégique du titane aéronautique reste intacte.

[4] - La stratégie protectionniste américaine

Depuis la chute du mur de Berlin en 1989, et consécutivement à l’éclatement de l’Union soviétique, le monde est rapidement passé d’un aspect bipolaire de guerre froide à un état de mono-superpuissance américaine pendant une décennie. Le plus lourd attentat terroriste au monde en 2001 puis la crise financière systémique de 2008-2009 a réduit la puissance américaine, alors que les pays émergents progressaient vite dans le capitalisme. Nous faisons maintenant face à un monde polycentrique d’une rare complexité, où les nouveaux pays riches tentent continuellement d’imposer leurs règles au reste du monde. Il est devenu fondamental de maîtriser et de protéger sa propre information stratégique : c’est le rôle de l’intelligence économique.

En réponse à cette agression économique de plus en plus présente dans le monde, les États-Unis ont compris dès les années 1990 qu’ils devaient réagir vite et ont décidé de créer le « National Economic Council » chargé exclusivement de protéger les intérêts économiques américains dans le monde. Conjointement, ils créés un organe responsable de la coordination de l’intelligence économique, le TPCC (Trade Promotion Coordination Committees) puis en 1996 ils adoptent l’« Economic Espionage Act » pour éviter la captation des données économiques sensibles.


IV - Approche française et retard historique

En France, l’information a longtemps été perçue comme un instrument de pouvoir personnel, ce qui a freiné la circulation de l’information au sein des entreprises et des administrations. Historiquement, la France a accusé un retard par rapport aux États-Unis ou à la Grande-Bretagne dans la valorisation de l’information dans les processus décisionnels. Durant l’entre-deux-guerres, les décideurs politiques et militaires français étaient réticents à intégrer le renseignement stratégique dans leurs décisions.

À l’inverse, les États-Unis ont développé dès les années 1960 le concept de « Business Intelligence », puis de « Competitive Intelligence », recrutant d’anciens membres des agences de renseignement pour anticiper les actions de la concurrence. Stevan Dedijer a formalisé dans les années 1970 l’importance de l’information, de la connaissance et de la technologie comme sources de puissance nationale, décrivant la transformation de la donnée en information, puis en connaissance, et enfin en « intelligence ».

La France a fini par enrichir le concept d’IE en adoptant une approche historique et multiculturelle, contrastant avec la vision anglo-saxonne plus monolithique. Le rapport Martre de 1994 a marqué un tournant, s’inscrivant dans la démarche du Commissariat général du Plan pour comprendre les facteurs immatériels de la compétitivité, alors que la fin de la guerre froide, la mondialisation et la révolution technologique déplaçaient les logiques de puissance vers la sphère économique.


V - Enjeux contemporains et conflictualité économique

Une fois encore, les États-Unis ont su être précurseurs en discernant la portée stratégique des politiques de raccourcis adoptées par certains pays émergents. Une telle politique consiste à repérer puis à intégrer le niveau technologique le plus avancé des nations industrialisées. Il s’agit d’une démarche structurée visant à organiser et optimiser les transferts de technologies, dans le but d’atteindre puis de dépasser les concurrents occidentaux. Le Japon a amorcé cette stratégie dans les années 60 pour devenir leader dans le monde de l'électronique et de l'automobile à partir des années 70-80. La Chine a également suivi cette stratégie à partir des années 90 pour s'imposer à partir du XXIe siècle sur un nombre de plus en plus étendu de secteurs stratégiques. Débutant dans le secteur agricole, la Chine s'est peu à peu imposée dans différents secteurs industriels jusqu'à arriver au secteur spatial et aéronautique.

La France s’est inscrite dans une dynamique d'intelligence économique stratégique en élargissant graduellement sa doctrine de défense économique à quatorze secteurs stratégiques couvrant les technologies de souveraineté indispensables à la sauvegarde des intérêts vitaux nationaux. Cependant, les discussions avec la Commission européenne ont été ardues, car cette dernière avait une conception très restrictive des intérêts stratégiques économiques. La tentative d’adopter une norme communautaire pour protéger des intérêts stratégiques communs face à certains investissements étrangers a alors buté sur un refus des institutions européennes. En effet, cela suppose de s’accorder sur la définition des secteurs stratégiques, ce qui demeure complexe hors du strict champ de la défense nationale et de l’énergie.

L’Union européenne n’a pas cherché à se doter d’un cadre d’analyse sur l’accroissement de puissance par la conquête ou la prédation économique, contrairement à des États comme les États-Unis, le Japon,  la Chine, la Russie ou la Corée du Sud qui en ont fait un pilier de leur stratégie de puissance.


VI - Nouvelles formes de conflictualité et enjeux géopolitiques

De nouvelles formes d’adversité économique émergent, rendant indispensable une veille d’intelligence économique pour contrer toute situation de vulnérabilité économique ou d’impact politique. Par exemple, la Russie contrôle une grande partie des matières premières mondiales, influençant indirectement la productivité des entreprises occidentales.

Cette dynamique d’accroissement de puissance par l’économie, adoptée par de nombreux États depuis longtemps, apparaît intrinsèquement liée à la mondialisation. Ainsi, l’ouverture des marchés s’est accompagnée d’une fermeture croissante des économies dominantes et d’une intensification de la guerre économique, où il devient, dans la compétition généralisée, de plus en plus ardu de tracer une frontière claire entre adversaires et alliés. On parle d'ailleurs de stratégie de coopétition, qui mêle donc coopération ponctuelle et compétition stratégique. À ce stade, l’Union européenne se révèle être un ensemble difficile à piloter et ardu à défendre, en raison des antagonismes internes persistants.

Les fonds souverains et les investissements directs étrangers (IDE) sont des conséquences directes de la mondialisation et de la financiarisation de l’économie internationale. Or, sachant que trente pays concentrent 90 % des IDE pour un total de 1200 milliards de dollars en 2010, il devient évident que le risque de dépendre du financement de quelques États, et de voir son économie asservie par des prises de contrôle hostiles, peut rapidement se matérialiser. En 2023, la concentration des IDE reste très forte : les 30 premiers pays continuent de capter l’immense majorité des flux et stocks d’IDE mondiaux, confirmant la tendance déjà observée en 2010. Les États-Unis, la Chine, Singapour, Hong Kong, le Royaume-Uni, le Brésil, l’Allemagne, la France, l’Inde, le Canada et l’Australie figurent toujours parmi les principaux destinataires d’IDE.

En outre, l’usage massif des fonds souverains par les pays du Golfe demeure très opaque, du fait de l’absence de contrôle et de règles financières strictes (contrairement aux banques d’investissement soumises à des directives prudentielles). Capitalisation peu transparente, stratégies d’investissement difficiles à décrypter et gouvernance mêlant intérêts publics et privés, ces fonds deviennent des instruments puissants d’agression économique, tout en restant sous le radar médiatique et politique. Nous renvoyons ici à l’article sur le Qatar pour des précisions sur ses investissements dans les secteurs stratégiques des principaux pays européens, au premier rang desquels le Royaume-Uni.

Dans ce contexte de mondialisation, et donc de nécessaire stratégie à l'export, l’entreprise souhaitant attaquer un marché international, doit se doter de tous les atouts pour réussir son développement commercial. Une des premières étapes naturelles passe par le partenariat avec des sociétés locales connaissant bien l’environnement, la collaboration avec des consultants proches du marché en cible, et l’exécution d’une étude complète et détaillée (survey) afin de cartographier au mieux le marché local, la concurrence et les risques spécifiques, ains que les tendances propres à ce marché. Il va de soi que l’ensemble des acteurs tiers impliqués dans ce processus doivent obéir à un processus de sélection draconien et rodé : screening des personnes clefs, due diligence et compliance pour la société.

Le cas emblématique d’Eurocopter en Inde entre 2007 et 2015 illustre les limites d’une approche commerciale traditionnelle focalisée uniquement sur la démonstration de la supériorité des produits, en ne concentrant l'effort de vente que sur des aspects techniques liés au produit ou service. Ce cas rappelle que lorsque l’on est confronté à des concurrents agressifs, sur un marché lointain, l’approche doit englober une analyse systémique poussée, incluant une analyse de l’environnement, du contexte, du marché concurrentiel, et faire l’objet d’une étude exhaustive de l’environnement et son contexte.

On peut voir ci-dessous dans l’extrait d’un tableur une liste thématique brossant l’ensemble de questions par catégorie que l’équipe commerciale évoluant dans sa pénétration d’un nouveau marché dans un pays doit se poser :

On voit ici que l’approche traditionaliste de focaliser uniquement sur les questions propres au produit, n’est que très parcellaire et dangereuse pour une compréhension globale. La rédaction d’une bibliothèque de questions par thématique est vivement conseillée afin de s’assurer de l’aspect exhaustif de l’étude.

Le droit est une arme qui peut être utilisée comme une épée, un bouclier et un détecteur des forces en présence et des flux d’informations. Néanmoins, le droit peut impacter ou aider la stratégie de l’entreprise à condition de le prendre en compte en amont, au moment de la conception de la stratégie pour la prise de décision. Le droit français est d’ailleurs mis à mal, car la rédaction des contrats se fait de plus en plus souvent en langue anglaise, soumis au droit anglo-saxon, et ceci indépendamment de la nationalité des parties contractantes ; cela permet de généraliser un langage pivot pratique dans le monde des affaires, tout en évitant des traductions bilatérales couteuses.

Une procédure juridique ou un contrat n’offre jamais une protection totalement étanche. L’atteinte d’un niveau de risque acceptable nécessite la conception et la mise en œuvre de mesures juridiques (contrats, protections), organisationnelles (organisation technique, renforcement du contrôle qualité, gestion des personnels du projet, de l’information, etc. et/ou matérielles [achat de coffre-fort pour stocker des données sensibles, mise à niveau du système de protection informatique, sécurisation des locaux, etc.]

Une illustration de subversion peut se trouver dans l’étude de la « guerre » de l’information russe, fruit de divers facteurs détaillés ci-dessous. Tout d’abord la chute de l’empire soviétique en 1991 qui a engendré une perte de leadership dans sa sphère d’influence traditionnelle. Vladimir Poutine, depuis son accession au pouvoir en 2000, cherche à restaurer la puissance russe et à faire oublier les années chaotiques de Boris Eltsine. À cela s’est ajouté l’essor du Web 2.0 qui à permis de faire d’Internet le plus vaste réseau de communication et d’information au monde devenant de fait un espace géopolitique à part entière soumis à des luttes d’influences et à des attaques cybernétiques entre puissances rivales.

De fait la « guerre de l’information » que livre la Russie à l’Occident relève d’une stratégie visant à utiliser le soft power des réseaux de l’information pour déstabiliser ses adversaires via des techniques de subversion.


VII - Agriculture, souveraineté alimentaire et compétition mondiale

Les accords du GATT (1986-1994) ont révélé la conflictualité des relations agricoles mondiales. L’absence d’accord commercial depuis 2001 illustre les tensions à l’OMC, l’agriculture restant le principal point de blocage. L’impératif de souveraineté alimentaire divise les nations : les pays émergents privilégient le libre-échange, les États-Unis maintiennent une politique agricole protectionniste, et l’Union européenne, réformant sa PAC, apparaît plus conciliante, voire soumise au libre-échange. Ce choix, risqué, pourrait affaiblir la puissance européenne au profit du Brésil et des États-Unis, détenteurs de « l’arme alimentaire ».

L’impératif de la « souveraineté alimentaire » occasionne un clivage profond entre les nations participant à l’échange international de produits agricoles. D’un côté les pays émergents inscrivent leur stratégie économique dans une démarche de libre-échange, de l’autre les États-Unis semblent s’arc-bouter sur une politique agricole protectionniste assuré par le Fair Act de 2008-2012 qui contient des moyens financiers importants pour soutenir leur agriculture locale primordiale aux yeux des Américains. La position de l’Union européenne apparaît en revanche plus conciliante, voire même soumise envers les sirènes du libre-échange. Elle a en effet depuis 2012 réformé à de nombreuses reprises sa PAC dans le sens d’une dérégulation des marchés agricoles.

L’Union européenne aurait-elle renoncé à s’engager plus avant dans la guerre agricole ?

Aurait-elle volontairement désarmé son arsenal agricole, son autosuffisance alimentaire, pourtant l’un des piliers de la construction de la PAC et donc de l’Europe au début des années 1960 ? Le pari est forcément risqué, car une telle stratégie s’inscrit dans un contexte accru d’instabilité des marchés agricoles (et surtout des prix des matières premières agricoles soumises aux spéculations du marché), et plus au-delà, d’instabilité géopolitique et géoéconomique.

Si tel est le cas, c’est un pan entier de la puissance européenne qui disparaîtrait, laissant au Brésil et aux États-Unis la liberté de dominer les marchés des produits agricoles et alimentaires, et donc de détenir, d’une façon ou d’une autre ce qu’autrefois on appelait « l’arme alimentaire ». L’agriculture et l’alimentation ne peuvent que relever de la souveraineté de l’État, celle-ci devant être prise dans sa fonction régulatrice de la vie dans la cité, sans toutefois négliger l’inévitable lien entre cette souveraineté et la puissance externe d’un État de se prémunir de toute forme de dépendance vis-à-vis d’autrui lors d’un conflit armé.

Un prochain article dédié à la politique agricole de la France détaillera ces différents principes dans le cadre national et européen, afin de fournir au lecteur une vue plus granulaire.


VIII - Cyberstratégie et guerre de l’information

La cyberstratégie ne doit pas être vue seulement comme une composante technique dont la responsabilité incombe à la direction de la sécurité des systèmes d’information, mais avec le spécialiste d’intelligence économique qui intervient à ce moment sur la dimension informationnelle de cette cyberstratégie d’entreprise.

La cyberstratégie, d’origine militaire, s’est développée autour des systèmes d’information pour le commandement des forces (SICF), avec pour objectif de protéger ses propres systèmes, d’acquérir des informations de l’adversaire, de les dégrader et de manipuler l’information accessible à l’adversaire pour altérer sa prise de décision. 

Comme toute activité de renseignement, le matériau premier de l’IE est l’information, qu’elle soit atomique (donnée/data management), composite (information/information management) ou complexe (connaissance/knowledge management). Ceci renvoie à la théorie de l’information qui distingue la donnée pure de l’information (celle-ci étant une donnée avec son contexte] et la connaissance [quand l’information est comprise et interprétée).

Le cyberespace est structuré en trois couches : 

  1. la couche physique (infrastructures réseau) : elle est constituée d’une part de toute l’infrastructure réseau (routeurs, hubs, cartes réseau, câbles et connectiques, fibre] ainsi que de l’ensemble des composants informatiques y communiquant (ordinateurs, tablettes, smartphones, disques amovibles ou non, cartes mémoires, etc.)
  2. la couche sémantique (contenu transitant sur le réseau, incluant les métadonnées) : c’est le contenu réel qui transite sur l’ensemble du réseau via la couche logique et qui se déplace et se diffuse via la couche physique. Cette information peut être de différente forme et contenir à la fois l’information à proprement parlé, ainsi que des meta-data additionnelles servant à la caractériser (horodatage, clef de chiffrement, données de transit sur le réseau, IP emettrice, etc.). Toutes ses données sont souvent collectées par des systèmes d’acquisition de masse [data lake] afin d’être stockées (big data) et analysées (dataviz).
  3. la couche logique (logiciels, protocoles de transfert) : c’est la partie software, où se distinguent la partie du génie logiciel (ensemble des programmes interagissant avec les utilisateurs et la machine) et la partie protocole de transfert, qui régit les échanges sur le réseau

La conflictualité dans le cyberespace oppose trois types d’acteurs : 

  • étatiques : cela regroupe aussi bien les états indépendants, que les communautés d’états (Commonwealth, UE, institutions internationales telles que l’OTAN, l’OMC, l’OCDE ou encore l’ONU) que des protoétats (Hezbolla, Daesch)
  • collectifs : il peut s’agir d’organisations publiques ou privées, de firmes internationales, d’associations, de collectifs, d’activistes, de groupements religieux, de syndicats, de sociétés de lobbyistes.
  • individuels : chaque individu peut jouer un rôle prépondérant, que ce soit des exemples tels que Snowden, Assange, Greenwald, l’homme qui a introduit la clef USB dans la centrale nucléaire de Natanz

Les stratégies de guerre de l’information se déclinent en trois catégories : 

  • L’espionnage ou la guerre pour l’information : Il est souvent qualifié comme deuxième métier le plus vieux du monde et trouve sa racine dans la guerre. Toutes les cyberagressions commencent par de l’espionnage et de la captation de données sensibles possédant une valeur pour l’agresseur.
  • Le sabotage ou la guerre contre l’information : Il s’agit par des moyens logiciels ou matériels d’empêcher un système de fonctionner correctement, soit en le dégradant soit en le détruisant totalement
  • La subversion ou la guerre par l’information:  Elle a de nombreux points communs avec ce que l’on appelle « guerre de l’information ». Les politiques d’influence qui s’exercent à travers des réseaux sociaux de parties prenantes d’entreprises étendues [organisations non gouvernementales], en utilisant en appui les sources ouvertes, puis en contrôlant les perceptions et initiatives. 

Dans tous les cas, il s’agit de diriger l’opinion à travers des actions de guerre psychologique, de guerre de l’image, de mise en scène et de désinformation, destinées notamment à faire adhérer l’opinion internationale à sa cause, à diaboliser l’adversaire ou à démoraliser le camp adverse. Ici, guerre de l’information est synonyme de propagande, manipulation mentale ou, pour employer un euphémisme militaire, d’influence stratégique.


IX - Intelligence économique territoriale (IET)

L’intelligence économique territoriale (IET) vise à organiser la collecte d’informations utiles aux acteurs économiques locaux pour leur exploitation, afin de soutenir le développement local et d’accroître l’attractivité des territoires. L’IET repose sur l’intelligence territoriale et s’adresse principalement aux décideurs locaux, notamment les dirigeants de PME et d’ETI. Cette discipline, récente (début des années 2000), nécessite encore une littérature plus abondante et une standardisation de sa définition. 

Un des enjeux consiste à éclairer les politiques publiques de développement local voire d’aménagement du territoire et à fiabiliser les choix composant la stratégie de développement économique régional. Le second enjeu consiste à mobiliser l’information pour construire et densifier la capacité d’influence et renforcer l’attractivité du territoire sur les différents échiquiers régionaux, nationaux, ou mondiaux. Encore une fois, une approche analytique « big data » permet de piloter au mieux en captant toute l’information et en la traitant en temps réel afin d’acquérir toutes les données pour un processus décisionnel optimal. Enfin, le troisième enjeu réside dans l’organisation de la sécurité globale : il faut protéger les actifs industriels et favoriser leur croissance et leur sécurité face aux nouvelles typologies de risques.

Sur le plan politique, le cadre légal de l’IET est fixé par une circulaire du Premier ministre du 15 septembre 2011, complétée par une circulaire du ministre de l’Intérieur du 24 avril 2012. Malgré la multiplicité des interlocuteurs (préfets de région et de département), le concept souffre de sa complexité et d’un manque de clarté sur les attributions de chacun. Une volonté politique plus affirmée est nécessaire pour sensibiliser les chefs d’entreprise à l’importance de l’IET et à ses enjeux.

La démarche d’intelligence économique par la maîtrise de l’information est une réponse formalisée à l’échelle des territoires dans ce que nous appelons en France l’intelligence territoriale. L’enjeu ici est de mobiliser des souces d’informations pertinentes pour l’organisation de systèmes d’information territoriaux en vue de créer une capacité d’analyse du local en écho à la mondialisation.


X - Conclusion

La menace qui pèse sur l’industrie française, et plus largement européenne, n’a jamais été aussi grande, comme le montre l’exemple Volkswagen, mais comme l'attestent toute la série des faillites industrielles sur le sol français. 

Au-delà des aspects énergétiques clairement identifiés par l'ensemble de la classe politique, les États-Unis disposent d’un avantage considérable en soumettant toute entreprise à leur intérêt national. Il est urgent que la classe politique française comble son retard sur la notion contemporaine de puissance. L’absence de débat public sur ce sujet au sein de la classe politique française demeure la principale faiblesse de la pensée politique nationale dans le monde multipolaire actuel.


Sources

Bibliographie

Plan de Guerre Économique de l'Allemagne - Siegfried Herzog - 1915 (édition française de 1919)

Les méthodes allemandes d'expansion économiques - Henri Hauser - 1915

Manuel d'Intelligence Économique, sous la direction de Christian Harbulot, 2e édition mise à jour PUF - 2015

L'impuissance française: une idéologie ? Plaidoyer pour la résistance et la renaissance - Eric Delbecque et Christian Harbulot - UPPR - 2017


Webographie

https://www.cairn.info/revue-francaise-de-socio-economie-2011-2-page-167.htm

http://les-yeux-du-monde.fr/actualite/concours/34624-la-guerre-de-linformation-russe-une-arme-de-destabilisation

https://portail-ie.fr/resource/bibliographie/459/guerre-economique-et-information-les-strategies-de-subversion

https://www.polemia.com/mouvement-de-masse-et-guerre-de-linformation/

http://baaziz.org/wp/modele-allemand-dintelligence-economique-embryon-ecosystemes-cooperatifs-modernes/

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